R&T 78 : La finance au service de la résilience alimentaire

Dans un monde en mutation où les enjeux alimentaires se complexifient, Baptiste ANDRIEU incarne une vision singulière et innovante de la finance au service de l’agriculture et de la résilience alimentaire. Administrateur au sein du Conseil National de la Résilience Alimentaire, Baptiste, diplômé de la 90e promotion de l’École d’Ingénieurs de PURPAN, s’est ensuite orienté vers un double diplôme en ingénierie financière à Toulouse Business School.

Dès ses études, Baptiste se passionne pour le domaine financier, trouvant dans ce secteur une vaste palette de solutions pour accompagner les mutations sociales et économiques. Après une première expérience en banque d’affaires au Crédit Agricole à Paris, il se spécialise dans des opérations de fusion-acquisition dans le secteur agri-agro et de financement structuré. Son parcours se poursuit avec un diplôme d’analyste financier à HEC Paris, puis une formation à l’Institut des Hautes Études de la Défense Nationale (IHEDN), orientée sur l’intelligence économique. Ce bagage solide lui permet de bâtir un pont entre finance et résilience alimentaire, avec une perspective entrepreneuriale qu’il déploie en rejoignant MiiMOSA à ses débuts. La start-up, pionnière du financement participatif pour le secteur agricole, lui offre une réelle expérience entrepreneuriale en matière de financement participatif. Son objectif est clair : reconnecter finance, citoyens et monde agricole pour une approche de la finance plus inclusive et participative. Porté par la volonté de créer des solutions concrètes pour le monde agricole, il fonde en 2022 Canopée Consulting, une banque d’affaires dédiée à la transition écologique, sociale et économique de l’agriculture. Aux côtés de deux autres diplômés de PURPAN, Corentin QUEMENER (promotion 90) et Julien LACHEZE (promotion 80), Baptiste place l’agriculture résiliente au cœur de son projet entrepreneurial. « Le fil conducteur de Canopée, c’est accompagner une agriculture transformante pour notre société », explique-t-il. Cette transformation repose sur des modèles agricoles capables de s’adapter aux crises tout en assurant la pérennité des exploitations agricoles.

Une transition progressive vers une agriculture résiliente

Le constat est sans appel pour Baptiste : le lien entre citoyens et agriculteurs s’effrite depuis plusieurs années, mis à mal par des vagues d’agribashing, phénomène de critiques virulentes contre le monde agricole, qui prennent de l’ampleur pour lui. Puis, plusieurs événements viennent redéfinir cette relation. La pandémie de Covid-19, d’abord, ravive la conscience collective autour de la souveraineté alimentaire, rappelant la place cruciale des agriculteurs dans la société. À cette crise s’ajoute la guerre en Ukraine, laquelle dévoile la dimension géopolitique de l’agriculture en soulevant des questions de sécurité alimentaire.

Ces crises successives révèlent un enjeu central : la résilience alimentaire. Baptiste décrit ce concept comme une approche globale, prônant une agriculture durable, capable de répondre aux défis environnementaux et de garantir la sécurité alimentaire. L’agriculture doit s’ancrer sur un modèle résistant aux chocs successifs : sanitaires, climatiques, géopolitiques ou idéologiques.

« L’agriculture est résiliente lorsqu’elle s’appuie sur trois piliers : la solidité écologique, la solidité sociale et la solidité économique. »

L'innovation, levier majeur de la résilience alimentaire

Selon Baptiste, l’innovation joue un rôle clé dans la construction de la résilience alimentaire. Si aucune innovation ne peut à elle seule répondre à tous les aspects de la résilience, de nombreuses avancées ciblent des domaines spécifiques, contribuant ainsi à renforcer l’ensemble du système. « Adopter de nouvelles pratiques est essentiel, mais sans mesure, impossible d’optimiser et de garantir leur efficacité », affirme-t-il. Pour illustrer son propos, il évoque une start-up toulousaine spécialisée dans le biomonitoring environnemental. Cette entreprise aide les agriculteurs à mesurer l’impact de leurs pratiques sur la biodiversité, leur permettant de réorienter leurs efforts si nécessaire. Ces outils de suivi des indicateurs environnementaux rendent les investissements plus pertinents et durables, en permettant aux agriculteurs de s’assurer que leurs actions portent réellement leurs fruits.

Outre la préservation de la biodiversité, l’innovation en agriculture touche également des aspects décisifs pour la résilience alimentaire : le développement de technologies visant à améliorer les pratiques agricoles, à réduire la pénibilité du travail, ou encore à encourager l’attractivité du métier d’agriculteur pour inciter les jeunes générations à rejoindre le secteur. « L’agriculture de demain doit intégrer des connaissances approfondies sur les écosystèmes, les cycles biologiques et les interactions entre le sol et les cultures pour être réellement résiliente », ajoute-t-il.

Pour une complémentarité entre filières locales et globales

Baptiste appelle également à dépasser l’opposition stérile entre systèmes locaux et globalisés. Selon lui, la résilience alimentaire nécessite une complémentarité entre filières longues et courtes, en fonction des spécificités territoriales et des types de produits. « Avec 66 millions d’habitants en France, il est difficile d’imaginer des actions radicales sans prendre en compte cette réalité démographique », explique-t-il.

Le partage de la valeur devient alors un élément central de cette stratégie. Comme le dit Baptiste « à chaque repas les français ont rendez-vous avec les agriculteurs », il apparait donc  essentiel de mieux distribuer les fruits de ce travail pour assurer la pérennité du métier. En promouvant des mécanismes de financement participatif et d’investissements durables, il espère ainsi créer des synergies positives entre les acteurs de la chaîne alimentaire, permettant de renforcer les liens entre producteurs et consommateurs.

« Les agriculteurs, véritables héros de notre alimentation »

Pour conclure, Baptiste insiste sur le rôle des agriculteurs qui dépasse de loin la simple production de nourriture ; ils sont également les garants d’un équilibre social et géopolitique vital. « Les agriculteurs jouent un rôle clé dans notre société, mais ce rôle est parfois oublié dans les débats actuels », rappelle-t-il. Dans un contexte où l’agriculture est souvent perçue à travers le prisme de l’idéologie, Baptiste appelle à une vision plus nuancée et pragmatique.

En créant des passerelles entre finance, citoyenneté et monde agricole, il aspire à construire un avenir où la résilience alimentaire ne sera plus un idéal, mais une réalité partagée et soutenue par l’ensemble de la société.